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Dès les débuts de la Nouvelle-France, en 1608, la colonie connaît des moments difficiles. Ses fondements étant basés sur l’économie, c’est donc une colonie commerciale. En conséquence, de 1608 à 1627, elle voit le nombre d’habitants dans la vallée du Saint-Laurent passer à seulement une centaine de personnes, dont une douzaine de femmes, surtout des jeunes filles. En 1627, le cardinal de Richelieu, premier ministre du roi Louis XIII, décide de trouver une solution au problème de peuplement de la colonie, que les marchands de fourrures semblent ignorer depuis les débuts. Pour ce faire, la Couronne décide de céder le monopole de la traite des fourrures et la responsabilité du peuplement du territoire à une nouvelle compagnie, la Compagnie des Cent-Associés, mieux connue sous le nom de Compagnie de la Nouvelle-France. Dès le départ, celle-ci connaît des difficultés : son premier contingent vers la Nouvelle-France, parti en 1627, est intercepté par des corsaires anglais. Puis, en 1629, Tadoussac et Québec tombent aux mains des frères Kirke. Ce n’est qu’en 1632 que la France et la Compagnie reprennent le contrôle de la colonie; entretemps, les investissements de cette dernière se sont évaporés. De plus, la compagnie constate que ses intérêts commerciaux sont incompatibles avec le projet de colonisation, les marchands locaux étant en compétition avec elle.
Même si les résultats ne sont pas très positifs, il y a quand même un peu de progrès. Par exemple, la Compagnie du Saint-Sacrement vient s’installer à Montréal (quoique plutôt à des fins religieuses et spirituelles), et quelques autres compagnies de traite de fourrures s’installent sur le territoire; cependant, le peuplement progresse toujours très lentement. De plus, la menace iroquoise nuit au peuplement de la Nouvelle-France, l’une des responsabilités de la Compagnie des Cent-Associés. Enfin, même du point de vue purement économique, l’expansion du commerce des fourrures par la Compagnie des Cent-Associés reste quand même minimale jusque dans les années 1670.
L’exploration du territoire connaît, par contre, un peu plus de succès. Samuel de Champlain est le premier à repousser les limites du territoire revendiqué par la France, qui envoie des interprètes dans ce qui est aujourd’hui le territoire ontarien, Étienne Brûlé étant probablement le plus connu. Par la suite, ce sont surtout les missionnaires qui deviendront explorateurs. Les Récollets, surtout les Jésuites, se rendent en Huronie pour vivre avec les Hurons et visitent les Iroquois. Par contre, en 1649-1650, la Huronie se retrouve déstabilisée, déstructurée et finalement détruite lorsque les Iroquois assaillent la région. Pour les survivants, l’exil est la seule option. Certains sont capturés par les Iroquois, d’autres fuient à Québec ou dans les alentours, et d’autres se réfugient dans la région des Grands Lacs. Les attaques iroquoises semblent avoir été provoquées par les épidémies qui ont ravagé et affaibli les communautés autochtones dans les années 1630 : la guerre des années 1640 leur permet de remplacer ceux des leurs qui ont été emportés par les épidémies. À l’époque, les Iroquois sont aussi mieux armés et mieux organisés que les Hurons.
Pour les Français, la perte de la Huronie a de grandes conséquences. Premièrement, ils perdent leurs alliés militaires, car même si une partie des Hurons se retrouvent en Nouvelle-France, ceux-ci ne sont pas assez nombreux pour soutenir la défense de la colonie. Et deuxièmement, ils perdent leurs alliés commerciaux, ainsi que le territoire traditionnel huron pour la traite des fourrures. Après la perte de la Huronie, dans les années 1650, l’administration coloniale, les Jésuites, les habitants de la Nouvelle-France et même leurs alliés autochtones demandent de l’aide de la France pour restaurer la sécurité et l’économie de la colonie; leurs lettres et leurs demandes répètent que les Iroquois constituent la plus grande menace pour la survie de la colonie en Amérique.
C’est donc à cette situation que se retrouve confronté Louis XIV lorsqu’il accède au trône de France, en 1661. Le peuplement et la sécurité de la colonie deviennent alors une de ses priorités, comme en témoigne le premier contingent des Filles du Roi, envoyé en Nouvelle-France en 1663. Deux ans plus tard, en 1665, le régiment de Carignan-Salières y débarque aussi afin d’assurer la sécurité de la colonie, et plus particulièrement de contrer la menace iroquoise.
Le régiment de Carignan-Salières est le seul régiment complet à être envoyé au Canada durant le régime français. Dans le but d’établir une présence française durable dans la colonie, les autorités coloniales offrent une variété d’incitatifs, tels que la distribution de seigneuries aux officiers du régiment ou le mariage de soldats avec les Filles du roi, afin de convaincre ces derniers de s’établir dans la colonie à la fin de leur service. Des 1 300 soldats et officiers du régiment envoyés en Nouvelle-France, plus de 400 s’établissent en permanence sur le territoire de l’Amérique du Nord.